Carnaval
De surprises en surprises, je découvre l’importance, ici, de la période du Carnaval. Il est partout « Vaval » ! C’est une boisson aux fruits, fort prisée par les enfants. C’est le thème de l’atelier « Art-thérapie » de l’hôpital de Montéran. C’est le point fort de l’année, au point que l’office de tourisme de Guadeloupe envisage de faire une édition estivale, pour attirer les touristes!
C’est, dans les rues et sur les routes de toute la Guadeloupe, depuis plus d’un mois, des jeunes, déguisés qui arrêtent les voitures pour quémander quelques sous pour les costumes, c’est le thème de l’animation des écoles, toutes ont eu leur défilé, au minimum dans la cour, accompagné du son syncopé du « ka ».
La Guadeloupe, comme toute la Caraïbe française a des jours fériés particuliers : « Mardi Gras » et « Mercredi des Cendres », points d’orgue de ces festivités où l’on va brûler Vaval !
Depuis des semaines des « déboulés » ont lieu, avec des thèmes rituels, dans toutes les agglomérations de Basse et Grande Terre. Je vous en livre quelques uns :
- Déboulé « Mas[1] a Rannyon » ;
- Déboulé « Nos ancêtres les Gaulois »
- Déboulé « La répression »
- Déboulé « Mas Tirayé Sénégal »
- Déboulé « Ti Mas Bwabwa »
- Déboulé « Mas a Zonbi »[2]
- ….
Plusieurs défilés auront lieu ce week-end pour la fin de la période du carnaval, avec pour chaque un entre 15 et 30 groupes carnavalesques qui se préparent depuis des semaines : musiques, costumes, danse…
Carnaval : tradition, folklore, hommage à l’histoire, survivance et expression de croyances ? sans doute un peu tout ça, en vrac, consciemment ou inconsciemment pour chacun, ici.
M’enfin, je m’interroge ! Quel sens a donc cet événement, détourné au point d’en faire une boisson pour enfants, exploité pour devenir une vitrine touristique, symbole pour certains d’une histoire d’où l’homme ne sort pas grandi ?
Qu’en penser quand un patient me confiait cette semaine qu’il ne voulait plus participer à l’atelier « Art-thérapie », parce qu’on lui proposait de fabriquer un masque, de carnaval. Mais, me dit-il, un masque, ce n’est pas un « objet » qu’on fabrique, un masque, c’est une représentation vivante, habitée. Rassurez-vous, ce patient est diagnostiqué délirant, mais quand-même…
Extrait du fascicule de Vokoum : « Nous rappelons qu’un « MAS » n’est pas un déguisement. Le « Mas », c’est l’ensemble des choses qui recouvre la personne de la tête aux pieds, dans la conception africaine du masque, contrairement au sens occidental qui renvoie au visage.
Le « Mas » » est, par conséquent, un héritage de nos ancêtres africains qui se sont servis du carnaval pour pratiquer « an dous »[3] leurs cultes religieux. Ils devenaient, en cette courte période de grande liberté et de dérision, des hommes habités par des divinités africaines au nez et à la barbe des hommes d’églises.
Une fois en « Mas », nous perdons notre identité, voyageons dans l’espace et le temps par la transe qui s empare de nous. Nous sommes alors « l’ESPRIT du Mas. Mofwazé an Mas.
Mystérieuse Guadeloupe, que d’interrogations vas-tu m’offrir ?